Le théâtre n’a pas été inventé par les Grecs mais par les enfants… Ce besoin viscéral, presque instinctif, d’utiliser la comédie ou le drame pour s’approprier le réel se révèle en effet dès le plus jeune âge. Ce que l’art théâtral a formalisé à travers le principe d’une scène, d’un public et d’une troupe d’acteurs interprétant un texte dialogué, ne serait-il donc pas finalement la répétition d’un réflexe infantile ? Ou exprimé plus tragiquement : d’un réflexe de survie…

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Il était une fois le jeu

Le besoin de réinterpréter la réalité, ou d’en créer une différente, est le propre de l’homme ; au même titre que le rire et les larmes. Il est émouvant de constater que malgré les nouvelles technologies, les moyens de communication toujours plus dévorants de temps et d’attention, le cinéma omnipotent, et l’oisiveté générale, le spectacle dit “vivant” résiste encore à sa propre désuétude. Car objectivement, quoi de plus “vieillot” que cette scène banale à peine réhaussée, que ce décor en carton-pâte, et ces quelques acteurs jouant avec les émotions comme s’ils se disputaient l’attention du public ? Mais c’est ainsi, rien ne pourra remplacer le direct du jeu théâtral, ni son ambiance créé par le confinement, dans un espace clos et parfois mythologique, d’une communauté d’hommes et de femmes.

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Les trois unités

Si les grecs semblent avoir imposé les premiers le principe de représentation, c’est-à-dire d’une séparation concrète entre ceux qui jouent et ceux qui regardent, c’est en France au XVII ème siècle que la règle dite des trois unités - de temps, de lieu et d’action - fut instaurée. Une scène pour créer un monde autonome, une seule intrigue pour enjeu, et une durée qui doit respecter la vitesse en tous les cas la cohérence de l’usure d’un temps court (en général pas plus de vingt-quatre heures) font de l’art théâtral un moment fragile à la tension créée par le présent de son action. Comme l’a si bien fait remarquer Louis Jouvet : “Au cinéma on a joué, au théâtre on joue !”, et c’est bien cette “chair” qui ose s’exprimer sans filet qui participe à la création d’une émotion plus sensuelle que celle que le cinéma tente de procurer en cherchant plus volontiers à se rapprocher du réel.

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Le langage du théâtre

Pour démontrer la **puissance jadis de l’art théâtral**, **il suffit de s’intéresser à son langage. Côté cour (la partie de la scène située à droite en regardant de la salle) et côté jardin ont été inventés pour permettre au metteur en scène de se faire comprendre de ses acteurs qui, en s’adressant au public, ont bien le cœur placé à gauche… La tradition des trois coups, qui mériterait un article à lui seul pour tenter d’en expliquer l’origine, a peu à peu disparu des scènes contemporaines mais créait chez le public une tension proche de l’extase. Et le fameux rideau rouge, qui lui aussi a disparu, et qui permettait de créer le mystère avant les premières tirades ? Un rideau qui n’a pas disparu du langage courant ; “tirer le rideau**“, ne signifie t-il pas qu’il est parfois nécessaire d’occulter de son âme les mauvaises pensées ou les désagrément de la vie ? Un peu comme au théâtre, quand on s’y rend pour assister à une autre réalité.

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